Les stations et domaines de ski PACA avaient jusqu'au 30 juin pour déposer leurs besoins

La Région PACA (Provence Alpes Côte d'Azur) a lancé en mars 2016 le Plan Smart Mountain, destiné à donner une nouvelle impulsion aux stations de ski des Alpes du Sud. Les stations du Queyras / Guillestrois sont naturellement concernées et ont déposé le 30 juin leur dossier à la Région. Voici quelques explications sur le plan Station de Demain / Smart Mountain, les projets annoncés des stations de ski du Queyras (7 millions d'euros) et celles du Guillestrois (Vars/Risoul). L'occasion aussi de dresser une photo des enjeux à venir.

 

Le plan SmartMountain Paca et les enjeux économiques du ski pour PACA

Le conseil départemental des Hautes-Alpes avait pourtant averti en 2015 qu'il n'allait plus pouvoir soutenir indéfiniement les stations déficitaires du département (28M€ depuis 2003 au profit des stations du Queyras).

Mais voilà que le résultat des élections régionales de mars 2016 a modifié la donne : la Région PACA (sous l'égide de son nouveau président Christian Estrosi) veut hisser au meilleur niveau les stations des Alpes du Sud, et aider les territoires à soutenir l'économie et l'emploi, via une meilleuire maîtrise de leur dépendance météorologique et de l'inter-saisonnalité des activités.

Le Président de Région est venu annoncer, le 11 mars 2016 à Montgenèvre, devant les élus des stations de montagne regroupés à l'occasion du congrès Association nationale des maires des stations de montagne des Alpes du Sud - ANMSM) :

  • sa volonté est de soutenir les territoires de montagne de PACA (3 des 6 départements de PACA sont alpins) : les aider à renforcer leur identité, d'en faire des aouts pour l'économie,
  • le lancement du contrat « Stations de demain » dans le cadre d'un plan global Smart Moutain "une station qui vise à réduire son empreinte écologique tout en proposant des équipements et des services innovants aux usagers de la Montagne (autochtones et touristes) en misant sur le numérique et la transition écologique et énergétique comme vecteurs de développement économique et d’attractivité."
  • aider les acteurs à  inventer les stations de demain : placer les stations au coeur des territoires, élargir les périodes d'activités, valoriser les diversité des patrimoines naturels/culturels de montagne, renouveller la fréquentation de la montagne ete comme hiver, attirer les touristes et redynamiser l’économie de nos montagnes, améliorer l'image de marque des stations de montagne des Alpes du Sud

A cette occasion, quelques chiffres ont été avancés concernant les Alpes du Sud, les stations et le ski

  • Les Alpes du Sud représentent 65% surface PACA, 15% des habitants, et sont le 2ieme massif de France.
  • Les Alpes du Sud représentent 15% du marché des sports d'hiver français, en 2nde position derrière Alpes du Nord
  • 6,7 millions de journées skieurs par an
  • 68 stations en 2013/2014 (nordic+alpin) : 756M€ de CA, 15 000 emplois dont 12 000 saisonniers
  • Un niveau d'investissement au plus bas de la décennie : 27M€ contre 217M€ dans les Alpes du Nord
  • Un taux de couverture en neige artificielle faible : le taux de couverture est en moyenne de 32% quand en Autriche le taux de couverture est de 70% et en Italie de 60%. Des saisons de plus en plus courtes

Les acteurs ont acté à Montgénèvre :

  • que pour qu'un domaine skiable soit attractif, performant et concurrentiel, il est absolument indispensable d’investir pour renouveler et moderniser les équipements, surtout qu'un emploi sur les remontées mécaniques génère entre 5 à 6 emplois indirects supplémentaires (effet de levier), afin de mieux gérer la pression concurrentielle des autres domaines (alpes du nord mais aussi suisse, italie, autriche, etc.)
  • que les stations doivent opérer une métamorphose pour s’adapter à toutes les saisons, afin de mieux gérer les nouveaux comportements / besoins des vacanciers (pluriactivité / multi saisonnalité) : des investissements doivent être réalisés pour mettre en oeuvre de nouveaux équipements utilisables tant l'été que l'hiver (ex: centres de remise en forme, piscine, etc.)

Bref, de gros enjeux économiques et des mutations à accélerer pour faire face, et l'envie de rattraper le retard pris sur les Alpes du Nord et les stations de ski étrangères. Ceci concerne naturellement les stations de ski alpin du Queyras / Guillestrois.

 

Les dossiers Appel à Manifestation d'intéret pour candidature Smart Mountain (contrat stations de demain Région PACA)

Afin de sélectionner les projets pouvant être financés par l'enveloppe des 100 M€ sur 6 ans, la Région a demandé aux stations de formaliser leur candidature et leurs projets. Les dossiers de 10 pages (stratégie à 5 ans et plan d'action) devaient être déposés avant le 30 juin 2016, afin de permettre à la Région de voir l'étendue des besoins. Les projets retenus doivent avoir pour objectif est d'améliorer la compétitivité touristique (une ambition renouvelés de développement économique) et de contribuer au developpement durable des stations de sports d'hiver et d'été de la Région PACA, en lien avec l’espace valléen concerné.

Ils bénéficieront :

  • de l'ingénierie technique de ARII (Agence Regionale de l’Innovation et de l’Internationalisation) et des services de la Région.: un accompagnement en terme de conseil stratégique et méthodologique
  • du label / Larque Smart Moutain : "les stations de demain en provence Alpes Côté d'Azur" : des opportunités de communication à travers une marque de territoire reconnue a l’international, des actions de communication (salons, d’objets, etc)
  • la marque French Tech mobilisera et fédèrera les écosystèmes de start-up autours de la thématique des sports de montagnes favorisant le développement économique et l’innovation.

Les dossiers devaient présenter des actions et investissements structurants prévus sur 5 ans sur les cinq axes d'intervention suivants :

  • Le développement des équipements structurants liés à la pratique du ski alpin et du ski nordique : remplacement/renouvellement de télésièges/ ascenseurs urbains pour les stations (favorisant l’accès sur le haut du domaine, desservant itinéraires découvertes piétons et restaurants d’altitudes,..), et les investissements en équipements de production de neige de culture (privilégiant ceux économes en eau, en consommation énergétique et sans adjuvants chimiques).
  • L’aménagement des cœurs de stations dans une perspective de développement des mobilités douces, de développement d’une autonomie énergétique de la station,
  • Les projets structurants qui misent sur le numérique (revolution numérique, panneaux d'affichage, le haut-débit, etc.)
  • Le développement du tourisme hivernal « après –ski » et 4 saisons (luges 4 saisons, patinoires écologiques…)
  • La rénovation du parc immobilier de logements touristiques (remise sur le marché de lits froids, réhabilitation énergétique, revision volumes)

Les premières actions financées sont prévues dès la saison de ski 2016/2017.

 

Espace Valléen Guillestrois/Queyras, Plan de développement numérique du territoire et SmartMountain

Ce plan Smart Mountain arrive d'un contexte où des changements importants sont en cours (loi NOTRe de réorganisation des territoires, exemption pour les stations classées, Acte II de la Loi Montagne) où plusieurs autres actions sont en cours (espace valléen notamment). Comme souvent, les sommes annoncées sont en parties issues de poupées russes !

Le plan Smart Mountain PACA prévoit ainsi de mobiliser des fonds provenant de la région mais aussi de l'Union Européenne (50%), notamment ceux de l'espace valléen et du numérique. Il permet de mettre une cohérence d'ensemble, et d'annoncer des chiffres ronds.
Le budget voté est ainsi de 100 millions d'euros sur 6 ans pour près de 70 stations dans les Alpes du Sud, soit 17 millions par an pendant la durée de la mandature.

 

Les enveloppes Espace Valléen : le Guillestrois Queyras a soumis son plan Espace Valléen Guillestrois Queyras. Ce plan permet de se répartir des subventions structurantes de l'Europe dans le cadre du massif alpin. Plusieurs axes stratégiques du territoire pour la période 2015/2020 ont été identifiés par le PETR (Pôle d’Equilibre Territorial Rural du Briançonnais, Ecrins, Guillestrois et Queyras (ancien Pays du Grand Briançonnais), les Parcs des Ecrins/Queyras, et les représentants des acteurs socio-économiques du Guillestrois / Queyras (Conseil de Développement et des offices de tourisme) :

  • l’éco-tourisme,
  • les sports de nature estivaux et hivernaux,
  • le patrimoine culturel, la communication,
  • l’aménagement des sites emblématiques,
  • la commercialisation, la structuration touristique,
  • les services,
  • l’éco-mobilité
  • l’accompagnement des professionnels,
  • la préservation de la biodiversité.

regroupés sous les thèmes suivants :

  • montagne d'expérience : plan de Phazy, maison du Soleil, Jardin de Mont-Dauphin, route des saveurs et savoirs / ateliers consom'acteurs, schéma des sports de nature /randonnées pédestres / VTT / eaux-vives / Biathlon, coordinnation des évènements, etc.
  • montagne en scène : Fort-Queyras, Col Agnel, passerelle himalayenne Mont-Dauphin/Guillestre, etc.
  • montagne d'accueil : aires camping-cars, plate-forme de mobilité, liaison cyclable Guillestre/Eygliers, étude organisation de la compétence tourisme dans le cadre de la fusion, animation du schéma éco-touristique, etc.
  • montagne de la biodiversité : conservation & valorisation de la tulipe de Guillestre, sensibilisation aux bonnes pratiques en montagne, outils pour mise en oeuvre stratégie biodiversité du Parc du Queyras, démarche de protection du Tetra-Lyre, etc.

Le Queyras/Guillestrois a ainsi vu fin juin 2016 son plan d'actions 2016/2018 de l'Espace Valléen (i.e une première partie des budgets libérés) validé par le comité du Massif Alpin. Celui-ci comprend une trentaine d'actions dont les deux actions majeures suivantes :

  • l'aménagement du centre thermo-minéral du Plan de Phazy
  • la réhabilitation de Fort Queyras

La nouvelle ComCom est en train d'étudier la récupération de financements complémentaire, compte tenu des masses financières à investir.



Les enveloppes Développement Numérique du territoire :  la Région PACA a été lauréate de l'appel à projet national au titre du développement numérique du territoire. Il s'agit là aussi de fonds de l'Etat et de l'Europe, abondés par la Région. L'état donnera 50M€ sur les 3 ans afin de faire de PACA «Un territoire connecté, désenclavé et attractif», disposant de l'équipement numérique en très haut débit. C'est ainsi que l'arrivée de la fibre se profile, mais pas que. Plus de 50 millions d'€ entre 2016 et 2020 seront donc consacrés à l'aménagement et au développement numérique des territoires alpins.

 

Bref, des sommes sont mobilisées pour faire changer les choses, une nouvelle ambition demandée, financée par les sommes repackagées des Contrats de Plan Etat/Région et des fonds européens (programme massif alpin des espaces valléens) pour faciliter la communication. Ces subventions ne feront pas tout, rappelons qu'il y a 68 stations dans les Alpes du Sud : 100/68 = 1.4 millions sur 6 ans, soit 245 K€/ an par station. Mais sans nul doute elles permettront d'amorcer une réflexion d'ensemble, ou d'abonder certains programmes d'investissement (financement partiel). Voilà pourquoi le département des Hautes-Alpes prévoit de compléter les financements des projets Smart Mountain lui aussi.

 

Les erreurs passées dans le Queyras / Guillestrois : l'exigence de piloter les affaires au plus fin

L'industrie du ski est on le sait une industrie difficile : il faut avoir des réserves pour éponger les années sans neige et les aléas, investir, et bien maîtriser coûts de fonctionnement vs investisssement, sachant que ces dernières années les habitudes de consommation ont fortement évolué notamment pour les activités d'hiver : baisse des revenus et du pouvoir d'achat, fractionnement / réduction des séjours (effet 35h ou pas), comparabilité des offres plus grande, augmentation du nombre de lits froids car ne correspondant plus aux standards du marché, etc.

Facile donc de critiquer, mais la situation des stations du Queyras n'est pas uniquement due au manque de touristes. Des erreurs d'investissement ont été faites, qui expliquent aussi le niveau actuel des forfaits (pas si éloignés de ceux de Réallon ou les Orres), elles sont régulièrements citées :

  • Des dameuses grands luxes hors service dès la première saison,
  • Le télésièges 6 places d'Abriès : un 2/3 place ferait l'affaire, pas de queue en bas mais attente aux téléskis du haut,
  • Le Télésiège de Ceillac un peu surdimentionné,
  • le Télésiège Molines rénové mais qui ne permet pas l'interconnexion avec Saint-Véran (sauf via des téléski)
  • Le Télésiège d'Arvieux rénové qui pourrait remplacer les 2 téléskis du haut
  • Le Réserve Colinaire Molines qui nécessite de pomper de l'eau en bas pour la redescendre ensuite, alors qu'on aurait pu utiliser les canaux ancestraux
  • etc.

Côté Forêt Blanche, ils ne sont pas en reste : des incohérences tarifaires entre Vars/Risoul, une mesentente entre Vars et Risoul sur la repartition des forfaits selon usage réel (Risoul doit près de 10M€ à Vars).

Pendant ce temps, les fabricants de remontées mécaniques sont les plus heureux : " oui, oui, vous allez pouvoir élargir la saison et amortir tout cela sans problème".

Bref, avec les aléas économiques et météorologiques, la gestion doit être effectuée au plus fin. Pas simple.

 

Les besoins recensés par la Régie des Stations du Queyras, et Vars Risoul La Forêt Blanche

Le compte rendu du conseil municipal d'ABRIES - juin 2016 - nous apprend que le Queyras aurait déposé un projet global d'amélioration des stations de ski de 7 millions d'euros, portés par la Régie Syndicat Mixte des Stations de Montagne du Queyras, avec une participation des communes. La station d'Abriès aurait ainsi réussi à mettre à la liste des besoins :

  • l'extension de la neige de culture,  
  • le nouveau téléski de la Brune, pour supprimer la navette entre le Roux et Abriès, et ainsi permettre aux skieurs de remonter en haut du domaine. On l'avait annoncé, des études avaient été lancées en 2015 sur le sujet
  • l'installation des Gazex pour le déclenchement des avalanches.

On parle dans les chaumières de 7M€, se répartissant entre 2M€ plan PACA, 2M€ abondement départment, 3M€ à charge des Queyrassins. Ce montant et cette répartition nous semble surprenants. Attendons un peu les chiffres officiels ! Mais bizarre qu'aucune communication n'ait été faite par la ComCom sur le sujet (rien dans la revue "Ensemble" par exemple) . Le Smart Mountain avait cependant pour ambition de fédérer les acteurs...

Côté Vars/Risoul : Vars a annoncé vouloir augmenter son domaine pour garantir la pérénité de la station  : 3900 lits supplémentaires, de nouvelles remontées (un télécabine), des rénovations. Côté Risoul, pas d'échos, nul doute qu'ils ont recensés des besoins aussi.

 

De la nécessite de penser à plus long terme, pour préparer l'avenir du pays

Colmater grâce au plan PACA c'est bien, mais restent les vraies questions :

  • remonter en altitude les stations, ou réorienter les stations trop exposées au Sud : si on parle de rechauffement climatique, quand est-ce qu'on en tire les conclusions ?
  • relier les stations entre elles, comme c'était prévu au début du ski dans le Queyras (ex: Abriès devait être relié à Aiguilles)
  • mettre en oeuvre un pass magnétique commun Queyras/Guillestrois, voire sur toutes les alpes du sud, et même commun ski de fond/ski de piste
  • remettre en marche les grands itinéraires de ski de fond du Queyras, qui en faisaient sa richesse, au lieu de niveler par le bas pour rendre le domaine quelconque donc comparable aux autres

Bref, des décisions à prendre, porteuses d'avenir, et anticipatrices.

 

Resteront les problèmes spécifiques à toutes les Hautes-Alpes, qui impactent forcément Queyras et Guillestrois : l'accès !

Le Tunnel du Chambon devrait ré-ouvrir en décembre, mais resteront les problèmes structurels qui condamnent le 05 à recevoir majoritairement des vacanciers en provenance de PACA, en raison :

  • des tarifs du train (Paris Briançon ou TER) plus cher que le transport individuel (160 Aller en train de nuit, 110 euro aller en train de jour), qui plus est avec des rames qui ont moins de régularité qu'au lancement de la ligne en 1885 ,
  • de l'absence de voie rapide Durance pourtant évoquée dans les années 70 mais rejetée : pendant les vacances, des bouchons monstres se forment ainsi
  • la déviation de la Roche de Rame ou d'autres localités (ex: Rond-Point d'Embrun, Pont de Savines) traversées par la Route Nationale Gap/Briançon
  • d'une autoroute A51 non terminée dans sa partie nord (interconnexion avec Grenoble)

 

Bref, ça bouge certe, mais pas trop dans l'échange  : des sommes sont mobilisées pour préparer un certain avenir, mais pour l'instant on raisonne à 5 ans. Espérons que nous aurons prochainement de plus amples informations et qu'un véritable débat d'orientation s'engage au niveau départemental et régional, grâce à l'expertise des structures de conseil (ARII). Ah la DATAR de Philippe Lamour nous manque !