Les Hautes-Alpes possèdent la plus grande concentration de cadrans solaires de France, avec plus de 400 sites recensés. Le Queyras n'est pas exempt d'un beau patrimoine gnomonique (du grec gnomon, "indicateur" - soit l'art de concevoir, de calculer et de tracer des cadrans solaires) : plus de 70 cadrans sont recensés, dont une trentaine rien que sur Saint-Véran. Ces cadrans sont soit peints soit gravés dans la pierre. La plupart portent des devises. Les cadrans solaires (ou gnomons) montagnards du Queyras ne sont pas des cadrans savants : ils sont d'abord utiles et apportent des messages séculaires de bonne sagesse. Voyons un peu plus en détail quand, par qui, et pour quel usage ils ont été crées.
Au sommaire :
Plusieurs raisons peuvent être avancées :
Les cadrans solaires célèbrent la lumière et le temps. Leurs fonctions sont multiples :
A noter que les cadrans solaires donnent l'heure locale,et non pas l'heure légale. Ainsi deux cadrans situés dans deux régions différentes ne donneront pas la même heure.
Enfin, il existe quelques cadrans accouplés, chacun étant peint sur l'une des façades de la maison et recevant des rayons spécifiques en fonction de l'heure de la journée.
Difficile de dire précisément quand ils ont été peints pour la première fois, mais ils ont été observés sur les bâtiments d'architectes grecs et romains datés de -25 avant JC.
En France, ils ont connus leur apogée à la fin du 19ième siècle, avant l'avènement de l'heure légale :
Suite à leur perte d'intérêt/d'utilité, beaucoup de cadrans solaires ont disparus. A ceci il faut ajouter les aléas climatiques (avalanche), les catastrophes (incendies) qui touchèrent parfois durement certains villages, et l'exode rural, avec abandon progressif de plusieurs hameaux, notamment à compter de 1911.
Dans les années 80, des passionnés ont re-découverts ces éléments caractéristiques du patrimoine haut-alpin, ont amorcé leur restauration, et obtenu l'inscription des plus majestueux cadrans à l'inventaire des Monuments Historiques (dans la liste supplémentaire le plus souvent), afin de protéger ce patrimoine.
Plusieurs artisans, appelés cadraniers, ont bien évidemment crées et entretenus ces oeuvres du patrimoine, dans chacun des villages.
Cependant, comme dans les autres arts picturaux, certains se sont particulièrement distingués, notamment le célèbre cadranier piémontais itinérant Giovanni Francesco Zarbula (dont l'initiale ZGF ou ZJT est parfois visible sur ses fresques), qui s'est exprimé entre 1832 et 1870 dans les Alpes et notamment le Queyras, le Guillestrois et le Briançonnais. Ses cadrans se distinguent aussi par la présence d'entourages en faux marbre, des parures faites d'oiseaux exotiques, de fleur et de la présence de l'oiseau solaire des Alpes - l'aigle.
C'est ainsi qu'au sein du Parc Naturel Régional du Queyras sont inscrits aux Monuments Historiques plusieurs cadrans solaires de Zarbula situés à Souliers, Eygliers, Arvieux, Ville-Vieille, Molines et Saint-Véran.
Plus recemment Remi Potey, Queyrassin d'adoption, a rénové un grand nombre d'entre eux, et crée des nouveaux cadrans solaires, en revisitant les techniques d'antan et savoir-faire traditionnels.
Les cadrans solaires du Queyras sont peints, contrairement à ceux d'autres régions, sur chaux fraîche :
On parle ainsi de peinture à fresque (de l'italien "a fresco" - à frais), avec un usage de la chaux comme base qui a l'avantage de permettre à l'oeuvre de respirer (et de laisser passer/sécher l'humidité et les variations de températures du climat du Queyras).
La pose d'un cadran prend une journée : le travail commence le matin et doit être terminé le soir.
Un cadran est habituellement orienté plein Sud et apposé sur un mur : il est appelé cadran méridional (ou cadran non déclinant) mural.
Cependant certains ont une autre orientation, ils sont appelés cadrans déclinants :
Bien d'autres types de cadrans existent en France (cadran horizontal, équatorial, analemmatique, etc.)à mais vous ne les trouverez pas dans le Queyras.
Les cadrans solaire se composent de plusieurs éléments :
Le fonctionnement est donc le suivant : le soleil illumine le cadran, et via l'aiguille génère une ombre portée sur la graduation, donnant ainsi l'heure. L'art du cadranier est donc de bien définir l'heure du lieu, en fonction de la situation exacte du mur par rapport au soleil.
Les cadrans affichant l'heure locale, à savoir l'heure du point géographique - compte tenu de sa situation par rapport au soleil, il est nécessaire d'apporter les corrections nécessaires pour retrouver l'heure légale.
De manière simplifiée, il faut, dans le Queyras, en été ajouter entre 1h30 / 1h40 à l'heure lue sur le cadran.
Il faut en effet tenir compte :
Les cadrans solaires sont accompagnés le plus souvent de devises en français, en latin ou en dialecte occitan :
Le plus souvent, les devises célèbrent, sur différents tons (interpéllatif, narquois, humoristique, moralisateur, épicurien,etc.) :
Vous trouverez ci-dessus des photos des principaux cadrans du Queyras, à commencer par ceux des clochers des différents villages du Parc Naturel Régional du Queyras. Nous compléterons régulièrement la liste de ceux-ci, en se concentrant essentiellement sur les cadrans ancestraux et historiques, témoins du patrimoine vivant et des traditions du Queyras à travers les siècles. Revisitez donc la page de temps en temps pour voir les nouveautés !